Il y a maintenant longtemps que j'entendai parler d'Erri De Luca, célèbre écrivain italien. Sa venue à Lyon pour les Assises Internationales du Roman m'avait renforcé dans l'idée que, quand même, il faudra bien que je le lise un jour. Alors, et puisqu'il faut bien commencer quelque part, autant commencer par le début.
Une fois, un jour est le premier roman publié d'Erri De Luca. L'auteur est né à Naples en 1950 dans une famille de la moyenne bourgeoisie. Dans son roman Une fois, un jour, également traduit Pas ici, pas maintenant (je laisse le soin aux italophones de choisir leur version préférée pour transcrire Non ora, non qui), De Luca replonge dans son enfance napolitaine par le biais d'une photo de sa mère prise à un arrêt d'autobus. Le narrateur s'adresse à sa mère à la deuxième personne, non pas pour régler des comptes, non pas pour pleurer un passé à jamais perdu, mais pour dresser le portrait de sa ville natale, Naples, pleine d'odeurs, de bruits et de couleurs. Sa mère est une figure adorée et redoutée et l'enfant, complexé par un bégaiement qui empêche un épanouissement total, se perd et se retrouve dans la contemplation de son milieu, de ses proches, de sa famille.
De Luca convoque l'adulte qu'il est devenu pour extraire les mots de cette bouche embarrassée. Au hasard des rues, il y a Massimo le bel adolescent, ami nageur du narrateur, fauché dans l'éclat de sa jeunesse; de belles américaines hautaines et inaccessibles; Filomena la domestique dévouée et pleine de vie; et cette mère, toujours, obsédante. La beauté de ce roman, c'est cet amour impossible entre la mère et son enfant, un enfant élevé dans le Naples populaire, des rues mal famées, d'une foule compacte et versatile. Les parents du narrateur y sont en transit, issus de familles aisées ayant tout perdu après la guerre, dans l'attente de jours meilleurs qui viendront. L'enfant, lui, aime cette ville et souffrira de changer de vie quand leur situation s'améliorera.
Sans juger ni reprocher, il partage cette situation inédite, de l'entre deux, qui a fait de lui ce qu'il est. Mon rapprochement est peut-être saugrenu voire impertinent, mais j'ai reconnu là la même mélancolie qui habite la chanson England made me des Black box recorder, un morceau plein de retenu et d'élégance, un regard tendre et bienveillant sur une situation pas toujours rose. J'y vois comme un nationalisme, un nationalisme mélancolique, résolument ouvert à tous et c'est très agréable à lire comme à écouter, quoiqu'un peu triste.
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