Lors de la dernière réunion du comité de lecture Aimer Lire jeudi 16 décembre, nous avons discuté d'une nouvelle d'Edgar Allan Poe : La Lettre volée.
Voici ce que nous en dit Jacques :
Les nouvelles policières sont marginales dans l’œuvre de Poe qui se présente surtout comme le premier « phare » de la littérature fantastique aux États-Unis et qui a inspiré de nombreux « héritiers » de Lovecraft à King en passant par Robert Bloch. Les caractéristiques « originales » de l’auteur s’expliquent sans doute en partie par une existence assez chaotique : vie familiale bouleversée très tôt, carrière militaire avortée, mariage avec une très jeune fille décédée prématurément et enfin une carrière littéraire et journalistique "bousculée" et peu gratifiante sur le plan matériel.
Les nouvelles policières se passent en France sous la restauration et le héros en est le Chevalier Dupin, sorte de Holmes avant l'heure accompagné d'un narrateur qui fait penser au docteur Watson (On peut d'ailleurs penser que Conan Doyle est aussi un peu un enfant de Poe). De nombreux écrits fantastiques et policiers de Poe ont été traduits en français par Charles Baudelaire et c'est le cas de La lettre volée. (la traduction du titre original: the purloined letter, prête d'ailleurs à discussion).
L'histoire est assez simple : un ministre peu scrupuleux a dérobé une lettre "compromettante" à une haute personnalité de la cour et s'est mis en mesure d'exercer un chantage en menaçant de divulguer la lettre en cause à tout moment. Pour de multiples raisons, le document est forcément caché au domicile du voleur. Mais le préfet de Police, malgré des fouilles répétées et approfondies (par ailleurs techniquement et pratiquement invraisemblables) n’a rien trouvé et s’en remet aux talents (d’ailleurs rémunérés) du Chevalier Dupin. Celui-ci, dans des conditions pour le moins abracadabrantes trouve la lettre, la récupère et la remet au préfet. En fait après avoir été « retournée » (il s’agit d’une lettre cachetée en usage au 19° siècle) vieillie et maquillée, la missive était bien en évidence dans un porte-cartes contenant des papiers de médiocre intérêt.
Par delà les invraisemblances et maladresses de l’histoire, il s’agit de démontrer que le meilleur moyen de cacher un objet est de le mettre en évidence en un lieu imprévu ou incongru après lui avoir fait subir une altération esthétique suffisante pour tromper celui qui cherche une chose d’apparence bien précise. Au fil du temps, cette « leçon de tromperie » a été élevée au rang de monument, et que ce soit dans la littérature policière ou même dans la vie quotidienne, il est courant de voir évoquer le principe ou le système de la « lettre volée ».
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Il y a 2 ans
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