mercredi 19 janvier 2011

Mon coup de coeur 2010

A l'abri des projecteurs, loin bien loin de sémillants prix littéraires qui se portent à merveille, merci, l'année 2010 a eu le privilège de voir réédité un étrange et court roman : Le Don de Vorace.


Le nom de l'auteur lui-même prête à rêver : Félix Francisco Casanova. Et puisqu'il faut bien faire un peu de biographie, avouons que celle-ci est fascinante. L'écrivain est né sur les îles Canaries en 1956 et meurt 20 ans plus tard, en 1976, des suites d'une fuite de gaz. Suicide ? Il semblerait.
Il a créé un groupe de rock et le mouvement littéraire Equipo Hovno. Il a reçu de nombreux prix : en 1973, à 17 ans, le plus important prix de poésie des Canaries : le prix Julio Tovar, pour son livre La serre, en 1974, le prix Pérez Armas pour son roman Le don de Vorace. Félix Francisco Casanova est aussi l’auteur du journal intime J’eusse aimé, écrit en 1974. Selon ce même journal intime, il aurait écrit Le Don de Vorace en 44 jours, entre le 9 juin et le 23 juillet 1974, il avait alors 17 ans.

On peut lire, ça et là, qu'on a affaire au Rimbaud espagnol. Poésie, jeunesse, refus, talent, il en faut finalement peu pour créer une filiation. Car au delà de l'incroyable force qui se dégage de la plume de l'Espagnol, la parenté avec le divin Arthur ne saute pas aux yeux.

Le Don de Vorace relate l'histoire à la première personne de Bernardo Vorace, jeune homme qui découvre après plusieurs vaines tentatives de suicide qu'il est immortel. Désabusé, Vorace évolue au milieu d'un monde qu'il exècre, méprisant formidablement son entourage et nouant autant que possible des relations malsaines.

Ce court roman nous parle de déréliction, de décomposition, physique et moral, de rêve et de poésie. Vorace semble en proie à des hallucinations de plus en plus violentes, et pourtant, à mesure que la folie grandit, la lucidité du narrateur se fait plus nette. Le réel n'a pas changé, c'est le personnage qui le voit mieux, le don de Vorace, ne serait-ce pas ça aussi, une meilleure acuité? Tout ça, on s'en doute, finira mal, très mal.

Le style est fougueux mais maîtrisé, tranchant, chaque phrase doit faire mouche, doit faire mal. Objectif atteint. L'ensemble est très drôle, encore faut-il être amateur de ce genre d'humour désespéré.
Un beau livre que nous ont offert les éditions Les Allusifs, une réédition qui tombait à pic au milieu de cette moribonde année 2010, c'est mon avis il n'engage que moi.

Je ne résiste pas au plaisir un peu niais de partager la photo de l'auteur, presque aussi christique et charismatique qu'un certain Jim Morrison, en plus juvénile bien sûr.


Précipitez-vous à la médiathèque où vous attend Le Don de Vorace. Bonne lecture!

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