vendredi 28 janvier 2011

L'Autre Jardin de Francis Wyndham

Lors de la dernière réunion du comité de lecture Aimer Lire jeudi 20 janvier, nous avons discuté d'un roman de Francis Wyndham : L'autre jardin.



Voici ce que nous en dit Aline :

Journaliste, critique et éditeur, Francis Wyndham se tourne tardivement vers l’écriture. Il était l’ami de Jean Rhys, du peintre Lucian Freud, d’Henrietta Moraes, la célèbre modèle de Francis Bacon. Après quelques nouvelles, L’autre jardin est son 1er roman publié en 1987, à 63 ans.

Ce roman d’une brièveté extrême, couvre une période assez longue, celle de l’Angleterre des années 30 / 40 et se situe dans un milieu middle class, avec omniprésente, la campagne anglaise, les maisons au toit de chaume et les jardins attenants soignés. Dans ce décor, on pourrait imaginer vivre une histoire tranquille, ordinaire, installés au Polly Tea Room avec les personnages et nous commanderions des scones, de la confiture et de la crème du Devonshire !

Oublions cela, les personnages de F.Wyndham sont pour le moins excentriques, inquiétants, voire violents. L’inquiétude sous ce vernis ‘‘so British’’, que l’on ressent est palpable tant à cause des comportements, des gestes, des rivalités, des paroles de chacun.

Le narrateur, un jeune homme né au lendemain de la 1ère guerre mondiale, de l’union d’un veuf d’âge mûr - qui s’échappait dans l’autre jardin pour être à l’abri des appels extérieurs – et d’une femme bien plus jeune, est là en spectateur, presque en voyeur, pourrait-on dire. La vie ne semble pas avoir grande importance pour lui en dehors de ce à quoi son affection s’attache. Lorsqu’il rencontre Kay, elle a une petite trentaine d’années. Il la trouve fascinante, un peu fofolle, libre, inapte au bonheur, une expression inquiète, une timidité manifeste (qui ) lui donnait un air traqué, la grâce maladroite d’une biche qui sent le danger sans savoir de quelle direction exacte vient la menace maladroite, inadaptée. Il faut préciser qu’elle est sous la coupe de ses terrifiants parents qui semblent lui vouer une haine mêlée de tenace mépris, sans que l’on en sache la cause.

Il est vrai que l’auteur ne s’attarde jamais sur ce que pensent ses personnages.
Il estime que tous les mots n’ont pas besoin d’être écrits, ils se devinent. Et dans ce roman, les émotions surgissent en dépit de ce qu’on sait et que personne ne dit.

Nous croisons aussi Dodo Bassett une ancienne actrice de cinéma avec laquelle le narrateur va au cinéma et nous fait sentir l’époque ; Sandy, le frère de Kay un jeune acteur transparent au physique androgyne, grande fierté de sa mère Sybil Desmarets ; Harry avec qui le narrateur engagé dans la Home Guard, auront à garder, pendant quelques nuits, un aérodrome, terminé depuis peu mais pas encore en service ; Howard Spangler, un GI ‘dragué’ par Kay dans un bar et qui se défilera lors d’un rendez-vous. Et puis bien d’autres...

Ce roman court sur une période assez longue autour de la 2ème guerre mondiale dont l’annonce fera dire à Sybil Desmarets ‘‘je pense que toutes ces rumeurs de guerre sont tout à fait inutiles, quelques peu irresponsables, et en outre, extrêmement dangereuses’’ ! Si ce roman parle de guerre, il traite aussi de tous les sujets chers à cette société anglaise des années 30-40 un pied en province, l’autre à Londres. Ce livre brosse un tableau de la société anglaise de la 1ère moitié du XXème siècle dont émerge le portrait d’une jeune femme farouchement inadaptée au conformisme tant familial que social ou sentimental mais incapable de claquer la porte pour s’en échapper.

Si, à la fin du livre, le narrateur estime le drame inévitable car à tous égards détruite par ses parents, il se reconnaît complice car ‘‘j’avais pu observer chaque étape de son développement et m’étais montré incapable d’intervenir’’. Il estime pourtant ‘‘ que Kay était une victime fatale d’une de ces pseudo-batailles dont l’issue est prévisible depuis l’origine parce que les vainqueurs ont la volonté inébranlable de l’emporter et que les perdants sont obstinément voués à l’échec’’.

On mettre en lien ce roman avec le dernier film de Tom Hooper Le discours d'un roi car cela se passe durant la même période en Angleterre.

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